J’avais écrit un petit article au sujet des Ateliers Gango l’an dernier. Le but de ateliers Gango est de développer une confiance en soi féminine et de combattre les violences machistes quotidiennes.
Depuis plus d’un an, il est difficile de se voir physiquement et pour mes amies, ce confinement a rimé avec un ralentissement de leurs activités.
J’ai souhaité discuter avec elles pour savoir comment elles avaient géré leurs activités durant ce lockdown.
Je leur consacre aujourd’hui une petite interview et je vous encourage à les suivre sur les réseaux sociaux en attendant qu’on puisse se retrouver dans une sororité bienveillante.
Comment avez-vous géré la crise du covid19 ? Comment avez-vous organisé vos activités ?
On a eu un petit moment d’inertie.
La crise nous a choquées et prises de court donc, on n’a rien fait pendant un petit moment. Dès qu’on a pu reprendre au mois de juillet, on a fait un atelier pour parler du confinement. Cet atelier-là nous a remotivées. Ensuite, on a décidé de développer notre présence en ligne durant le reconfinement via les réseaux sociaux. On a aussi géré la gestion administrative de l’asbl.
Cette crise sanitaire nous a permis de nous concentrer sur les aspects plus administratifs. Nous sommes, depuis peu, une association reconnue juridiquement. Notre site internet va également bientôt voir le jour.

On a travaillé sur des éléments qu’on n’avait pas pu développer dans le passé. Cependant, Cette situation reste compliquée. Le covid nous bloque quand même beaucoup car on répond à des appels de projets mais nos emails restent sans réponse.
Comment s’est passé votre atelier sur le confinement en juillet 2020 ? Qu’est-ce qui est ressorti de cet atelier ?
C’était l’occasion pour nous de donner la parole aux femmes. C’était un moyen de se retrouver, de s’exprimer et de recréer du contact et du lien social. C’était très nécessaire. Nos membres parlaient encore plus que d’habitude et ça se voyait que ça leur faisait du bien.
Le fait de ne pas pouvoir se rencontrer physiquement est compliqué mais en même temps, vous ne pensez pas que cette situation renforce l’importance de ce que vous faîtes ?
Le but des ateliers était quand même la rencontre. Cette année, on a créé des ateliers en ligne via zoom avec l’Université Saint-Louis.
On a aussi créé des petites vidéos pour toucher les femmes différemment. On a développé une série de vidéos mais notre but, c’est que nos ateliers restent physiques. On souhaite permettre la rencontre des femmes de milieux et d’âges différents.
Notre objectif de rencontre, de solidarité, d’échange intergénérationnel et interculturel se retrouve plus dans la rencontre réelle. Il y a quelque chose d’assez magique qui se passe dans ce cadre.
Il y a beaucoup de personnes qui sont tombées dans la précarité. Est-ce que vous travaillé sur la santé mentale ?
Récemment, nous avons créé des ateliers destinés aux étudiantes de l’Université Saint-Louis.
On a pris un temps pour discuter des problèmes que les étudiants rencontrent. Comme par exemple, le port du masque. Certaines n’arrivaient pas à bien s’exprimer avec le masque lors des examens oraux.
Pour le moment, on se concentre sur 2 publics cibles : les jeunes universitaires et les mamans.
Nous allons discuter de cette anxiété sociale dans les ateliers prévus avec les jeunes. Dans les écoles, il y a un besoin qui est reconnu. Beaucoup de jeunes sont dépressifs. On offre des espaces de paroles et je pense qu’il y a une demande. C’est une bonne occasion pour tout le monde.
Les mamans ont aussi besoin de parler du confinement. Celles qui se sont retrouvées en télétravail avec les enfants.
Nos ateliers ont encore plus de pertinence pour le moment. Vu qu’on a moins de contact social, c’est l’occasion de recréer du lien.
Alors pourquoi avoir choisi Saint-Louis pour démarrer ces ateliers dans les écoles ?
Je pense qu’ils se sont rendus compte qu’il y avait des problématiques. Ils ont mis en place une cellule genre car rien n’était fait à ce niveau-là alors qu’il y avait quand même des problèmes de sexisme.
Lors de la quinzaine du genre organisée à Saint Louis, on a envoyé un mail de présentation de notre association. Suite à cela, la responsable du pôle des inégalités de genre de Saint Louis a assisté à plusieurs de nos ateliers et nous a proposé une collaboration au sein de l’Université. On avait très envie de commencer dans cet établissement universitaire car nous sommes des anciennes étudiantes de St Louis. C’est là que tout a commencé, donc il était évident pour nous de proposer nos ateliers.
C’est à Saint-Louis que notre amitié a vu le jour mais aussi, notre prise de conscience, nos projets, notre vie militante, et surtout notre émancipation en tant que jeunes femmes. Saint Louis représente une période importante. L’époque où on s’est libéré parallèlement dans nos vies de femmes.
Pour l’instant, cette collaboration se passe bien. On discute ensemble des thèmes à aborder et notre liberté de parole est respectée durant nos ateliers. Alors parfois au niveau des choix des thèmes, il faut parfois qu’on insiste afin de repousser les limites. Aborder le thème de la sexualité a été un peu difficile à faire accepter car il y a encore certains tabous. Mais nous aborderons dans nos deux prochains ateliers, le thème des relations toxiques et de la sexualité.
Alors bien sûr que l’idée, ce n’est pas de se limiter à Saint-Louis même si c’est pour l’instant une de nos priorités. On aimerait s’étendre dans d’autres établissements et pas qu’universitaires. Par exemple, dans les hautes écoles, les écoles de promotion sociales, les écoles secondaires, les associations, les maisons de quartier, … Notre souhait est d’être présentes dans différents milieux bruxellois.
Est-ce que vous avez vécu beaucoup de sexisme à l’Université?
C’était insidieux. Sur le coup, je ne me rendais pas vraiment compte. Nous étions une grande majorité de filles dans l’auditoire mais c’était en majorité des hommes qui prenaient la parole en cours. Et la majorité de nos professeurs étaient masculins.
On avait aussi beaucoup d’amis garçons mais on était fort jugé. C’était une autre époque. Aujourd’hui, les étudiantes sont beaucoup plus conscientes de tout ça. Elles sont toutes au courant des concepts comme la masculinité toxique, la culture du viol… Alors, que nous n’avions pas du tout connaissance de ça. Pour illustrer, aux abords de l’université, à la fin de notre cursus, on pouvait lire des tags sur les murs dans la rue : »Etudiantes de saint Louis, putes à n*gro », ça illustre un peu la situation. On ne s’est pas toujours sentie légitime ou prise au sérieux durant ces années d’études. Revenir sur ces lieux pour sensibiliser les jeunes femmes, c’était une sacrée victoire à nos yeux.
Quels sont vos projets futurs ?
Nous allons bien sûr continuer nos collaborations avec nos partenaires : planning familial ROSA, grève collective 8 mars, Toestand ASBL, Université Saint-Louis…
Mais cette crise sanitaire nous bloque un peu dans nos perspectives futures. Il est difficile d’envisager des ateliers étant donné l’incertitude de la situation sanitaire. Parfois, c’est décourageant car on se nourrissait beaucoup de notre sociabilité et de la vie culturelle et militante bruxelloise. Mais sur le long terme, on souhaiterait s’étendre dans différents lieux de la ville. On développe à côté de ça, l’aspect digital de notre association en proposant des courtes vidéos témoignages de femmes sur les réseaux sociaux. On envisage également de faire des ateliers ouverts à toutes en ligne. On doit pouvoir s’adapter et offrir des espaces de sociabilité et de réflexion car on sait que cette crise a aggravé la situation sociale et psychologique des femmes. Il faut plus que jamais, continuer à offrir des espaces de libération de la parole.
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